Réorienter nos Églises vers une dynamique missionnelle : diriger vers le changement

« Allez, faites de toutes les nations des disciples ! » (Mt 28.19). « Suivez-moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes » (Mt 4.19). Le moteur de la mission de Dieu, c’est son cœur de compassion pour les humains (Mt 9.35-10.1). Ce n’est donc pas l’Églisequi a une mission, mais c’est le Dieu de la mission qui a une Église, et qui veut faire participer celle-ci à son grand mandat.

Mais comment l’Église peut-elle être davantage fidèle à ce grand mandat ? Quel est le point de départ du changement missionnel ? Il commence dans le cœur des gens qui composent nos Églises. Et il ne commence pas à partir de l’endroit où nous voudrions qu’ils soient !

Voici 4 états de l’Église aujourd’hui, du plus endormi au plus réveillé. Pour accomplir le grand mandat, chacune de ces Églises est appelé à vaincre des obstacles et à relever des défis.

1) L’Église réactive :

C’est une Église qui sait que beaucoup de choses ont changé. Mais elle manque d’ouverture. Elle décide de se replier sur elle-même, et de se protéger de ce qui se passe à l’extérieur du bâtiment de l’Église. Elle perçoit « le monde » comme une menace. Cette Église peut être décrite, au mieux, comme un paquebot de croisière qui navigue en eaux troubles. Au pire, c’est un cuirassé qui voit des ennemis partout autour de lui, un navire de guerre qui torpille la culture ambiante. Une telle Église ne se préoccupe pas de ce qui l’entoure et n’accorde que peu, voir aucune attention à ce qui se passe dans les eaux où elle navigue. Sa théologie est réactionnaire. Elle se préoccupe des formes extérieures de la piété et néglige la compassion. Dans ce genre d’Église, on devient meilleurs à définir ce que nous ne sommes pas – le monde – qu’à savoir qui nous sommes en Christ.

Et pourtant ! Le prophète Jérémie ne nous rappelle-t-il pas que notre vocation est de bénir la Babylone où Dieu nous a placé, et ceux qui l’habitent ?

2) L’Église « développementale » :

Cette Église croit que pour croître et atteindre de nouvelles personnes et sphères de la société, elle doit simplement améliorer ce qu’elle fait déjà. C’est ce qu’on appelle le ministère de l’attractivité. Une telle Églisese concentre sur les formes extérieures : construction de meilleurs bâtiments, programmes efficaces ou divertissants, contenus jugés pertinents quand ils attirent les gens à l’Église. On peut penser aux Églisesqui mettent l’accent sur une louange-spectacle, et investissent une grande part de leur budget dans des accessoires, spots lumineux et machines à fumée. Ces Églisesse comportent comme de véritables aspirateurs pour les chrétiens qui viennent des autres Églisesalentour. Dans de telles Églises, il n’y a pas de véritable changement, mais seulement quelques ajustements et distorsions de la tradition.

Les Églises« développementales » sont dangereuses. Pourquoi cela ? Dans de telles Églises, la vue est plus importante que la foi, et la taille de l’Égliseest plus importante que la croissance spirituelle de ses membres. Autre danger : ces Églisesgravitent souvent autour de la personnalité charismatique de leur leader. Et quand celui-ci tombe, les brebis sont dispersées.

Et pourtant, en tant qu’Église, notre mission ne repose pas sur le moi, mais sur Dieu : ce n’est pas la missio-me mais la missio-dei.

3) L’Église transitionnelle :

Cette Églisereconnaît la nécessité et l’importance d’étendre son influence au-delà de ses murs. Cela n’exige pas de modifications importantes de son organisation et de son fonctionnement. Mais au lieu de se poser la question : « Comment pouvons-nous attirer les gens vers nos activités actuelles ? », une telle Églises’intéresse à ce qui se passe à l’extérieur de la communauté. Elle se demande : « Où Dieu est-il en train d’agir autour de nous ? », « Quel est le but de Dieu dans cette ville, ce quartier, cette région qui est la notre ? », et « Quelles adaptations sont nécessaires pour entrer en contact avec ceux qui ont pris leurs distances avec la foi et la possibilité même d’une vie d’Église ? ».

Pour répondre aux besoins, elle n’hésite pas à investir dans le recrutement de pasteurs associés. Fidèle envers la mission de Dieu, elle a compris que le grand mandat inclut la totalité des nations, et toutes les catégories sociales.

Où est notre cœur ? Va-t-il vers les perdus, ou vers notre confort personnel ?

4) L’Église missionnelle :

En adoptant une approche missionnelle ou transformationnelle, les Églises comprennent que leur objectif n’est pas de suivre des tendances, d’adopter des outils, des nouvelles ressources ministérielles, de nouveaux modèles ou les grands concepts les plus récents. Il s’agit plutôt d’incarner un rôle missionnaire au sein des communautés de vie qui entourent l’Église. Cela implique un double effort. D’une part : contextualiser l’Évangile et l’exprimer en tenant compte du langage et des coutumes de la population locale. D’autre part : revoir l’organisation, le programme et les structures de l’Église pour s’adapter au contexte actuel. Pour ce faire, il est nécessaire de renoncer à des idées abstraites de l’Église datant d’une époque révolue.

En tant qu’Égliseappelée à entrer dans la missio dei, nous devons nous réapproprier deux mouvements, deux forces :

– la force centripète. Dans l’Ancien Testament, Israël était censé attirer les peuples en ayant un comportement différent : saint. Et l’Église, assemblée du Nouveau Testament, est appelée à rayonner en incarnant l’Évangile. Ainsi, elle attirera le monde vers Christ.

– la force centrifuge. Les disciples de Jésus sont envoyés dans le monde, et l’Église, c’est la communauté des disciples : une communauté d’envoyés.

En Jésus, Dieu s’est fait chair et il a habité notre quartier. Il est la lumière du monde, qui attire les hommes vers l’amour du Père. Mais il est aussi l’envoyé de Dieu, et il nous envoie, à notre tour. Ensemble, dans nos Égliseslocales, relevons ce défi !

Desmond Henry, librement adapté par Aurélien Bloch